22 février 2021 : Blog FISH AND CHIP’S – épisode 2
Et maintenant, le CHIP’S (pour le FISH voir épisode 1)
Telle une malédiction qui s’abat sur les campagnes océanographiques, la guerre de l’eau semble inévitable, et cela malgré les nombreux moyens déployés. D’aucun se jette sur les bouteilles GloFlos (Graal de la pureté) ou sur les Niskins (pour les moins exigeants). A leur retour à bord, les enchères montent et ces bouteilles (12 L) ne permettent pas toujours d’étancher notre soif. Pour ceux qui se contentent de l’eau de surface, le jeu peut devenir cruel. Bien que présente à l’infinie autour de nous, échantillonner cette eau reste difficile sur un navire tel que le Marion Dufresne. En effet, afin de nous protéger du turbulent Océan Austral, nous nous trouvons à 7 mètres au-dessus de la surface, tendre le bras ne suffit donc pas. Il faut alors pomper !
Les pompes du bord acheminent depuis les tréfonds du navire de l’eau en abondance directement dans nos laboratoires. Malheureusement, les canalisations du vénérable Marion, qui ont subi la rudesse du temps et des éléments, enrichissent l’eau en métaux et risquent de modifier considérablement la qualité de nos précieux échantillons.
Pour pallier à ce problème de taille, nos ingénieux ingénieurs déploient le FISH dont les capacités natatoires lui permettent de s’extirper de l’emprise métallique du bateau. Les chimistes sont ravis : de l’eau propre, en abondance, à toute heure de jour et de la nuit et ce sans avoir à stopper le navire. Que demander de plus ?
Oui mais….. ce système pose un problème de taille pour un biologiste comme moi. En effet, le FISH aspire l’eau de surface depuis le pont principal (à 7 m au-dessus de l’eau). Ceux qui se rappellent de leurs cours de physique auront bien noté qu’une telle hauteur d’aspiration génère des risques de cavitation. Si le FISH brave vaillamment cette loi physique immuable, les cellules de plancton sont fragiles et un tel traitement -générant de nombreuses microbulles risque de les faire exploser.
Alors il faut redemander aux géniaux ingénieurs de remettre la main à la pâte, de plonger dans les entrailles du navire, en dessous de la surface pour installer une pompe ne risquant pas de caviter ainsi qu’une nouvelle canalisation en teflon traversant le bateau pour délivrer de l’eau suffisamment propre proximité de nos laboratoires. Le CHIP’S est né, certes moins propre que le FISH mais tellement plus doux avec nos adorées cellules planctoniques.
Je remercie donc tous les collègues qui subissent nos exigences et qui y répondent toujours positivement et dans la bonne humeur.
CHIPs, SHIPs, SHEEPs, CHEAPs ?
Pour la petite histoire, un débat agite les membres de la campagne SWINGS concernant le CHIP’s. Si tout le monde s’accorde sur la prononciation, certains militent pour l’orthographier SHIP’s (étant donné le caractère marin de l’installation), d’autre CHIP’s (pour les amateurs de gastronomie anglaise). Mais pourquoi pas SHEEP’s vu les nombreux moutons que nous offre l’Océan Austral ou CHEAP’s pour mettre en avant le principe «Do it yourself» du concept ?
Bref, si tout le monde ne s’accorde pas sur l’orthographe, moi je ne suis tout de même pas loin de la satisfaction.