L’océan Austral, situé entre 40 °S et l’antarctique, est une région difficile à explorer car lointaine et très agitée (40emes rugissants, 50emes hurlants). Son rôle dans la séquestration du CO2 atmosphérique est important et les acteurs de cette séquestration sont complexes : rentrent en jeu l’activité biologique (photosynthèse en surface, chaine trophique, export de matière carbonée vers les abysses, séquestration dans les sédiments) et la circulation océanique (courants marins, transports de masses d’eau).
Appréhender ces processus requiert d’être capable de les quantifier, ce qui est en partie possible grâce aux mesures de traceurs dits « géochimiques ». La grande majorité de ces traceurs sont des éléments chimiques présents en concentrations infimes dans l’eau de mer. Les objectifs de la campagne SWINGS (Marion-Dufresne II, 48 scientifiques, 52 jours de mer) sont de déterminer l’origine (atmosphérique, sédiments, hydrothermalisme, circulation horizontale…) de ces éléments dits « en traces », dont certains exercent un rôle crucial dans l’activité photosynthétique. Nous étudierons les transformations d’état physique, chimique et biologique qu’ils subissent dans la colonne d’eau ainsi que leur « moyen de sortie » de cet océan (export vers les abysses et sédiments).
En parallèle de ces objectifs, un des volets importants de l’état chimique est la concentration en CO2 des eaux de surface, qui est comparée à celle de l’atmosphère. C’est fait depuis 30 ans sous forme d’une surveillance annuelle, le Service National d’Observation OISO, qui sera conduit cette année en même temps que SWINGS. Un deuxième programme de suivi temporel de données, THEMISTO, est embarqué sur SWINGS et étudie les écosystèmes pélagiques grâce à l’outil acoustique en établissant la distribution en 3-D à haute résolution du zooplancton et du micronecton sur un large gradient latitudinal. L’objectif est de comprendre comment se répartissent ces organismes en lien avec la physique océanique, la biogéochimie et le climat, et aussi en lien avec les prédateurs supérieurs qui se concentrent dans certaines zones marines pour se nourrir. Enfin, un troisième projet s’appuie sur la plateforme du navire pour établir des mesures physiques de la distribution des aérosols (épaisseurs optiques, granulométrie) dans l’atmosphère de l’Océan Indien, MAP-IO. Toutes ces études sont complémentaires des objectifs de SWINGS et vont permettre d’en élargir les résultats tout en s’en nourrissant. De séduisants bénéfices réciproques à venir !